Mobiliser des personnes actives devient un enjeu difficile, mais important pour la vitalité des clubs.

Cela pourrait s’expliquer par le manque de disponibilité des Rotariens. Le temps est devenu une ressource rare et chère. Cependant, ces mêmes personnes se donnent du temps pour accomplir plein de projets, aux plans personnel ou professionnel, par envie de performance, pour des besoins matériels ou du fait d’injonctions de leur management. Voici ce que j’imagine pour revivifier nos rangs dans un monde en profonde évolution.

Le temps dédié à la cause rotarienne ne représente plus qu’une portion congrue du fait d’une gestion de priorités qui lui est défavorable. L’idéal rotarien, la fierté d’appartenance ne suffisent plus à la mobilisation des Rotariens. La pandémie a largement fait la démonstration de nouvelles méthodes de travail, avec plus de souplesse engendrant une efficacité identique voire meilleure. A titre d’exemple, il ne sera pas très difficile de trancher entre passer une matinée le samedi à suivre une formation, et consacrer ce temps à sa famille ou ses loisirs, voire partir en week-end. Ce d’autant que les nouveaux outils ont l’avantage d’être disponibles à toute heure. Peut-être est-il utile de s’interroger, et c’est une piste pour le futur, sur les leviers de motivation au plan personnel. A savoir, la nature du bénéfice que le Rotarien en retire : comme l’amélioration de son expertise surtout si elle lui est utile dans sa vie professionnelle ou familiale ; la valorisation de ses compétences ; une action de leader dans un domaine de compétence qu’il exerce déjà par ailleurs ; l’implication opérationnelle dans une cause qui lui tient à cœur.

Du pyramidal au réseau

Le Rotary de par son histoire, s’est naturellement développé à l’échelle géographique et son organisation en est l’image : continents, zones, pays, districts, secteurs, clubs. Le positionnement du district s’en ressent, étant parfois perçu  comme une superstructure au-dessus des clubs, ces derniers fonctionnant plutôt en vase clos, la transversalité n’allant pas de soi. Nous pourrions imaginer de renforcer le positionnement du district comme un centre de ressources, avec une animation par « métiers » : trésorier, secrétaire, protocole, les commissions, en lien direct et à disposition des clubs. Le Président du club ne serait plus le point de passage obligé de toutes les sollicitations du district, ses collègues du bureau étant en lien avec leurs alter ego par métier, ce qui limiterait leur isolement. Une animation par visio-conférence facilement disponible, pourrait être utile pour épauler, partager, échanger sur les pratiques et les expériences des uns et des autres, entre pairs. Les présidents auraient accès à un « coach » pour les accompagner dans la conduite de leur club. Tout président élu n’est pas forcément formé ou n’a pas l’expérience pour assurer l’animation de son équipe. Alors qu’aujourd’hui chaque club devrait produire son plan stratégique, peut-être pourrions-nous raisonner en bassin de vie, avec les clubs présents sur ce territoire ? Pourquoi ne pas se coordonner en amont pour choisir parmi les 7 axes stratégiques, ceux qui apparaissent pertinents sur ce territoire et définir quels clubs portent quelles priorités ? Cela améliorerait la transversalité entre clubs, limiterait le syndrome de « meilleur élève » et conduirait collectivement, sur cette unité géographique, à donner plus d’impact à l’action rotarienne.

Un recrutement pour répondre aux enjeux stratégiques

L’autre dimension touche au recrutement, qui connaît depuis quelques années, une lente et continue décroissance. Notre réponse collective de recrutement en nombre répond à l’enjeu de combler le déficit, mais cela ne garantit pas pour autant son efficience, sans occulter la tendance à créer de nouveaux clubs alors que le recrutement peine. Si les clubs ne recrutaient pas seulement en nombre, mais aussi de façon à se doter de compétences en déficit, en adéquation avec les priorités ? Ainsi à titre d’exemple, pour promouvoir l’axe environnement, serait-il opportun de recruter des personnes dont le métier touche à ce domaine. Il est plus facile pour une personne qualifiée de décliner son expertise au service du Rotary quand elle l’exerce déjà au plan professionnel. Nous le faisons bien pour les postes de trésorier par exemple. Pourquoi ne pas recruter un Rotarien dès l’âge de 18 ans, alors que la loi lui donne le droit de vote ? Ce qui supposerait d’intégrer le Rotaract au sein du Rotary et peut-être d’aménager sa cotisation par un système de rabais dégressif selon sa situation. Il n’est un secret pour personne que les jeunes jouent des réseaux sociaux comme personne, ont une créativité et une énergie débordantes, disposent d’un regard sur le monde bien à eux. Tout ce dont le Rotary se prive en recrutant à un âge avancé. Encore faut-il qu’ils soient intéressés de rejoindre le Rotary. Ce qui suppose de renforcer ce qui fait sens pour un Rotarien. Un point de convergence avec les jeunes, de plus en plus sensibles à cette dimension. Le temps est révolu où être sollicité pour faire partie du Rotary était considéré comme un insigne honneur et une reconnaissance d’honorabilité et d’aboutissement.  Demain, le Rotary renforcera sa crédibilité par sa capacité à s’ouvrir à toutes les couches sociales, aux porteurs de sens, aux responsables qui portent des initiatives pour le bien-vivre ensemble. Le Rotary communiquera concrètement et sobrement sur ses interventions locales, régionales et montrera en quoi la situation des déshérités aura été améliorée.

Un rôle selon sa compétence et son expérience.

Les Rotariens nouvellement nommés sont souvent très impliqués dans l’organisation d’événements, sont dynamiques et regorgent d’idées. L’importance de l’implication, l’intégration des nouveaux Rotariens est primordiale. Au fil des années et pour diverses raisons, ce feu sacré des premières années s’étiole cependant. Peut-être pourraient-ils trouver un second souffle dans un rôle en adéquation avec leurs appétences. Dans l’entreprise, on parlerait de bilan de compétences, souvent en prévision d’un départ. Au Rotary, cela s’appellerait « compétences-clés » avec de nouvelles perspectives. Les actions rotariennes sont le fruit du travail de milliers de bénévoles, prêts à consacrer du temps et de l’énergie pour la bonne cause. L’animation de toutes ces bonnes volontés ne peut s’opérer qu’avec un regard respectueux, bienveillant et reconnaissant. Ces bénévoles doivent être soutenus, encouragés et le cas échéant, bénéficier de formations bénéfiques à titre personnel et professionnel. Une manière de conjuguer les aspirations personnelles et les besoins du Rotary. Le développement du Rotary passera par le développement personnel des bénévoles qui le composent.

Vincent Barbaras
Président du RC-Metz-doyen